17 mars 2024 - Saint Avit - Gavaudun.

La vallée de la Lède : circuit St Avit, Gavaudun, Lacapelle- Biron (17 mars 2024)

A l’heure où le printemps renaît, 33 randovaliens découvrent le hameau de St Avit blotti sur un coteau bien éclairé ; ce site nous séduit déjà par son emplacement mais aussi par les couleurs des pierres de ces maisons authentiques .Dominant la Lède, rivière qui donne son nom à la vallée, ce site médiéval daterait du XIIème siècle ( en 1153 , une bulle papale adressée de Rome à l’abbaye de Sarlat mentionne les nombreuses possessions de celle-ci parmi lesquelles figurent St Sardos de Laurenque et ses dépendances dont St Avit . Ce village dépend donc à ses origines d’un pouvoir religieux. Son église romane à clocher carré fortifié (début du XIIIème) se dresse majestueusement attestant du rôle religieux de cette paroisse jusqu’en 1822. En raison du déclin de l’activité de St Avit, le pouvoir paroissial revient alors à Lacapelle-Biron.
Nous traversons le hameau vers l’ouest et en contrebas, deux bâtisses attirent notre regard : la « maison natale de Bernard Palissy » et une maison forte , flanquée d’une tour de noblesse dont la porte est surmontée d’un blason, sans doute martelé à la Révolution. Cette dernière témoigne d’une histoire mouvementée dans cette région frontalière entre possessions des rois de France et d’Angleterre.
Quant à Bernard Palissy (1510-1590), est-il né vraiment ici ?
La seule indication sur sa naissance : des registres judiciaires dans lesquels il est signalé comme natif de l’Agenais ; or le seul lieu en Agenais à avoir revendiqué la naissance de cet « architecte en œuvre de terre » est le petit hameau de St Avit .
Autodidacte, issu d’une famille modeste, il est avant tout un homme de la Renaissance, à la fois philosophe, physicien, géologue, agronome… et écrivain. Son père, peintre sur verre, lui apprit le métier et, après de nombreux voyages, il s’établit à Saintes où il fit ses célèbres recherches sur l’émail blanc qu’il mit au point progressivement. C’est la perfection avec laquelle il reproduisait les animaux, les plantes, les roches qui fit le caractère exceptionnel de B Palissy dans l’art de la terre ; ainsi naquit « l’Ecole Palissy » avec ses fils et ses disciples. Ses céramiques attirèrent l’intérêt du Connétable Anne de Montmorency ; grâce à la protection de la reine Catherine de Médicis, il établit son atelier dans la cour des Tuileries. Converti au protestantisme en 1546, il fut arrêté à plusieurs reprises mais échappa au massacre de la st Barthélémy ( 1572) ; cependant refusant d’abjurer, il fut arrêté en 1588 et enfermé à la Bastille où il mourut en 1590.

Nous longeons la Lède et, par un sentier bordé d’arbres nous quittons le vallon afin d’atteindre la Bourderie d’al Tuc. Notre cheminement nous conduit progressivement, sur des chemins émaillés de fleurs (ficaires, pâquerettes, violettes, pervenches…) et nous approchons de Lascombettes. Empruntant une petite route de campagne, nous suivons le GR 636 au niveau du bois de Billot puis cheminons à travers de belles clairières où la nature s’éveille. Soudain, la pente devient plus raide ; nous « plongeons » en direction de la Lède au débit abondant et atteignons le moulin du Milieu. Ce ruisseau qui prend sa source à Lacapelle – Biron actionnait autrefois 10 moulins sur à peine 6 km (Majoulassy, moulin du Milieu, moulin de Gavaudun…) . Certains étaient des moulins à grain, d’autres des forges ; les plus importants furent des papeteries (jusqu’en 1900 pour le moulin du Milieu). Malgré une production appréciée même à l’étranger, les maîtres – papetiers cessèrent peu à peu leur activité en raison du poids des redevances et du manque de chiffons.

En bordure de la D 150 nous découvrons Gavaudun dont l’imposant château construit sur un éperon rocheux long de 300m et haut de 40m s’avance au milieu de la vallée sauf du côté nord où fut creusée une tranchée. Cette forteresse érigée au XI e sur cette défense naturelle était inaccessible ; de plus son entrée constituée d’une grotte suivie d’un puits et d’un escalier en pierre assurait sa protection. Néanmoins, elle fut à ses débuts un repaire d’hérétiques et de bandits de grand chemin. Aussi en 1165, l’évêque de Périgueux fit assiéger et détruire la forteresse. Celle-ci fut reconstruite au début du XIIIe siècle sur les fondations du 1er château ; le donjon du XIV e intact avec ses 6 étages culmine à 70 m au-dessus du sol. Il fut militairement et psychologiquement une véritable épouvante pendant la Guerre de Cent Ans (1337- 1453) .
Possédé par de grandes familles de la noblesse régionale – principalement les Durfort et les Lustrac, tous en faveur du roi de France – le château résista à de nombreuses menaces . Aujourd’hui il appartient à la commune depuis 1796.

Après une pause face au cet édifice, nous le contournons pour grimper sur un sentier pierreux jusqu’à un calvaire situé près de l’ancien prieuré de st Sardos de Laurenque . Là ne subsistent que des pans de murs. Qu’est-il advenu ? Cet édifice religieux attesté en 1153 comme appartenant à l’abbaye bénédictine de Sarlat, son église était alors église paroissiale. Détruit pendant la Guerre de Cent Ans, l’ensemble appelé « le couvent » est reconstruit fin du XVe – début du XVIe. Mais au début des guerres de Religion (XVIe) , Gavaudun devenu protestant, le prieuré fut incendié en 1569 par un habitant du village et le seul religieux catholique y fut brûlé vif. Notre randonnée nous conduit près d’un autre édifice, l’église Ste Anne de Laurenque. Edifiée au XIIe siècle, de style roman elle est en forme de croix latine ; le chœur et l’abside sont couverts d’une voûte en cul- de -four ; l’abside est décorée de 9 arcades soutenues par des colonnes et dans la partie supérieure, des modillons aux figures grimaçantes ou aux motifs géométriques ainsi que des trous ronds (les métopes) ornent l’ensemble. Le portail occidental n’a pas de tympan mais 4 bandeaux composent les voussures en plein cintre ; dans les angles rentrants, 2 plates-bandes sont ornées d’entrelacs, de quadrupèdes et de poissons ; les chapiteaux des 2 premiers pilastres représentent des lions accompagnés de serpents. Mais, l’heure avançant, nous poursuivons notre chemin…

Nous empruntons le GR 636 qui, à travers vallons et prairies nous ramène vers St Avit ; nous surplombons le moulin de St Avit avant de franchir le petit pont sur la Lède et retrouvons le village, petit joyau au milieu de la campagne. Après une halte pique- nique bien méritée et un moment découverte intéressant (vieilles bâtisses, église, petit cimetière), nous nous dirigeons toujours par le GR 636 vers Lacapelle- Biron. Au XIIIe siècle, il existait ici une « capella » ; le village serait né au XVIIIe s de l’impatience du Marquis de Biron qui ne supportait pas l’agitation au pied de son château les jours de marché. A peine entrés en ces lieux, nos regards se portent sur un monument remarquable dressé sur la place du village. Il rappelle un moment douloureux de son histoire : au matin du 21 MAI 1944, par la route de Gavaudun est arrivée une compagnie tristement célèbre, la division Das Reich. Après avoir rassemblé des hommes de 18 à 60 ans, les Allemands repartent avec 48 hommes auxquels s’ajoutent à Gavaudun des prisonniers des villages des environs ; cent dix-huit hommes partent pour Dachau et Mauthausen d’où très peu reviendront. Nous prenons le temps de saisir tout le sens de ce Monument départemental de la Déportation puis traversons le village aujourd’hui paisible et bien restauré.
Notre randonnée se poursuit dans des sous-bois fort agréables ; quittant le GR, nous atteignons le lac du Moulinal et son camping installé dans un écrin de végétation. Après avoir traversé la D 255, nous reprenons des sentiers champêtres pour revenir à St Avit.
Encore une fois ce fut une belle journée ! Merci à tous et à bientôt sur les chemins …