3 novembre 2022, Prats du Périgord.
Oh ! quelle bonne idée que de venir se dégourdir les papattes à Prats du Périgord aujourd’hui jeudi 3 novembre, à 35mn de route de Puy-l’Evêque.
Nous sommes un bon petit groupe de 16 participants dont 3 nouvelles recrues de Montcabrier, pour le parcours de "La boucle Les Mines" d’une distance de 8.2 km et un dénivelé de 187 m.
Rendez-vous pris sur le parking derrière la mairie.
Prats du Périgord, au pays du châtaignier, est un beau petit village bordé par la Lémance et s’enroulant autour d’une magnifique église à clocher mur.
La pierre ocre et noire des demeures du village donne déjà le ton : nous sommes dans une région ferrugineuse ! Voilà le titre de notre randonnée !
Il se situe à l’extrême Sud du Périgord Noir : cette région tient son nom à sa forte concentration de chênes verts très sombres qui donnent cet aspect brun foncé à cette partie de la Dordogne. C’est historiquement la plus ancienne appellation des 4 couleurs (Blanc, Pourpre et Vert).
Le Périgord Noir est le comté qui a vu le jour sous Charlemagne.
Nous commençons notre randonnée en direction d’Orliac, sous un ciel menaçant mais nous avons la foi.
Nous longeons un sympathique jardin couvert de fleurs sur la gauche et déjà de beaux chênes verts sur la droite.
Il est certain, nous ne pourrons pas nous tromper de direction dans notre parcours : une signalisation sans faille, propre et superbement détaillée jalonnent les sentiers. Merci au département !!
Au prochain croisement, les rondins de bois bien alignés le long du sentier et l’orangé de la végétation nous imposent l’automne même si les températures douces pourraient le faire mentir.
Le chemin en herbe nous attend sur la gauche pour continuer sur un tapis de feuilles et déjà ça monte, ça tourne en épingle à cheveux et un boulevard s’ouvre à nous majestueux, bordé de grands et épais arbres dont la variété (châtaigniers, chênes et pins) a occupé les charbonniers à partir du XVII/XVIII siècle, surtout pour alimenter les forges et se chauffer.
LE CHARBONNIER
Le charbonnier fabrique le charbon de bois grâce au bois des châtaigniers auquel il adjoint du chêne et du pin. Il confectionnait une meule en empilant verticalement les rondins de bois autour d’une cheminée centrale. Le volume de la meule pouvait atteindre 15 stères
Ils recouvraient la structure de terre pour la rendre étanche. Ils mettaient le feu à la meule et surveillaient en continu la fabrication du charbon de bois.
LE TANIN
Les vieux châtaigniers impropres à la menuiserie et à la charpente étaient utilisés pour faire du tanin qui lui servait pour la préparation des cuirs épais.
Au milieu de chênes d’Amérique, un sentier d’herbe, de glands et de belles feuilles brunes, descend, monte, tourne pour nous mener à une immense prairie qui est actuellement habitée par de beaux chevaux blancs avec en arrière-plan, une grange ou un hangar qui autrefois devait servir au séchage des feuilles de tabac.
LE TABAC
Nous longeons un champ qui nous rappelle que le Périgord est une terre de production de tabac.
Une fois séchées, les feuilles sont transformées par les cigarettiers de Sarlat et le musée d’anthropologie du tabac de Bergerac vous en livre tous les secrets.
Le mot tabac est un mot d’origine indienne que Christophe Colomb a ramené de sa découverte des Amériques (1492) et qui était utilisé pour se soigner et pour des cérémonies.
Nous poursuivons en direction Le Mondou en empruntant sur quelques mètres, la route du Maine qui nous dirige vers une forêt très dense de chênes et de châtaigniers : nous sentons déjà une forte humidité et comme tous les critères sont réunis en ce lieu, quelle a été notre surprise ?
La trouvaille de deux cèpes !! Merci la nature !
Nous voilà sur le site Les Mines avec à notre droite, enfoui sous d’épaisses ronces les restes de mur du tunnel de la mine de fer et à notre gauche les cavernes.
Quelques gouttes de pluie nous rappellent qu’il faut presser le pas. Nous quittons le carrefour des randonnées pour rejoindre les Grands-Bos. Nous passons une futaie de chênes non greffés, des codres et leurs glands craquent et roulent sous nos pieds. ouh ça glisse !!
La pluie se fait plus dense et heureusement, nous atteignons la ferme de La Pradelle, lieu de notre pause-café !
Le jour du repérage, nous avions sympathisé avec les hôtes de cette bâtisse. Aujourd’hui ils nous ont gentiment accueilli sous leur grange à l’abri des gouttes, une table de camping dressée et prête pour le service du café chaud et des sucreries que nous leur offrons avec grand plaisir.
Ce fut un moment convivial et bien sympathique.
Nous reprenons nos sacs à dos, nous laissons le lieu-dit Francillou à gauche en direction de l’impasse des Charbonniers et passer entre rondins de bois, très beau corps de ferme et noyers noirs d’Amérique dont les fruits, boules jaune/marrons jonchent l’herbe.
Nous contournons un hameau, longeons un superbe mur de pierre sèche avec en son milieu des grosses pierres formant un bel escalier dont certains ne manquent pas de gravir.
Nous nous rapprochons du village avec vue sur notre droite du cimetière qui a été délocalisé en 1937.
Il côtoyait l’église. Un jardin de buis a remplacé les tombes et donne une meilleure vue de l’édifice.
La Lémance, en petit filet d’eau, longe la nationale.
Les 12 coups de midi nous rappellent qu’une visite de l’église nous attend.
Nous nous dirigeons donc vers le centre du village.
Ce fut une sympathique randonnée, tout en douceur, un peu humide et une température clémente.
Je voudrais terminer ce texte par une phrase :
Un sentier tout en odeurs de bois et de fumées, d’effluves de fer et de ferrailles oubliés.
Un sentier tout en passion pour les métiers oubliés autour des mines de fer et pour celui de charbonnier qui se perpétue.
Quelques mots à propos de l’INDUSTRIE ANCIENNE DU FER, caractéristique de la région : dès le Moyen-Age, l’industrie du fer en Périgord est associée à la vie rurale. Ce sont les paysans qui fouillent les gisements à temps perdu, « entre la fin des vendanges et la récolte des foins ». Un ou deux charbonniers fournissent le combustible. Le fourneau est un trou creusé dans le sol et tapissé de briques cuites. On y met des charbons ardents, puis le minerai, lavé et pilé. Des outres gonflées d’air assurent la combustion tandis qu’on brasse le métal à l’aide d’une perche de bois vert. Les forges avaient à portée le bois et le minerai. Dès que l’un ou l’autre était épuisé, on abandonnait le fourneau et on allait s’établir ailleurs. C’est ce que l’on appelait « les forges volantes », une véritable industrie itinérante pour laquelle le Périgord se trouvait remarquablement doté, avec son fer de surface et ses immenses forêts de chênes et de châtaigniers. (Source : Hélène Honnorat : Article « La métallurgie en Périgord -1934 -)
Au centre du village, se dresse l’ÉGLISE SAINT MAURICE, édifiée de la fin du XIIème au début du XIIIème siècle. Au XIIème, elle dépend de l’abbaye de Sarlat et porte le nom de Santa Maria de Pratis (Sainte Marie des prés, des prairies). C’est plus tard qu’elle sera dédiée à St Maurice, légionnaire thébain qui refusa, au prix de sa vie, d’obéir à l’ordre de l’empereur Maximien de persécuter les chrétiens. On lui prête ces mots : « Nous préférons être victimes que bourreaux, mieux vaut pour nous mourir innocents que vivre coupables ». L’église se trouve sur la route entre Domme et Villefranche du Périgord, sur le passage des bandes armées. C’est pour se protéger que les villageois ont construit son imposant clocher-mur. Au-dessus de l’abside, se trouve une chambre de défense, qui rappelle que l’édifice a traversé les affres de la guerre de Cent Ans. Ce beau vaisseau roman assure la continuité de la mémoire collective.